Trouver le point sensible : mission impossible pour un virus qui traite le cancer du cerveau?

Faire échec au cancer du cerveau est un véritable exercice d’équilibre. Du moins, c’est ce qu’en pense David Stojdl, Ph.D.

 

Stojdl fabrique des virus qui, d’une part, ciblent les cellules tumorales dans le cerveau, pour les infecter et les signaler comme étant dangereuses. Il ne faut surtout pas infecter de cellules saines.

 

« Le tissu du cerveau n’est pas propice à la régénération. Donc, si vous introduisez un virus dans le cerveau, vous devez être certain qu’il va infecter et détruire uniquement les cellules cancéreuses », explique M. Stojdl, chercheur financé par BioCanRx scientifique principal à l’Institut de recherche du Centre hospitalier pour enfants de l’est de l’Ontario (CHEO) et professeur à l’Université d’Ottawa.

 

Ces virus, d’autre part, doivent être assez puissants pour faire leur travail : donner un coup de fouet au système immunitaire et lancer une attaque mortelle contre les cellules cancéreuses tout en réduisant au minimum l’inflammation, dont les effets peuvent être graves.

 

David Stojdl met ainsi au point une approche thérapeutique nouvelle, l’immunothérapie par virus oncolytique, une biotechnologie émergente assez puissante pour  révolutionner le traitement du cancer.

 

Avec l’aide de BioCanRx et de la Société canadienne du cancer, ainsi qu’en partenariat avec la Fondation du CHEO, le projet catalyseur de M. Stojdl adapte la plateforme de cette immunothérapie oncolytique pour traiter l’un des cancers du cerveau les plus mortels, le glioblastome multiforme (GBM).

 

Tumeur cancéreuse du cerveau la plus courante chez l’adulte, le GBM grandit rapidement et envahit profondément le cerveau. Les traitements ne se sont pas améliorés depuis 35 ans et les personnes atteintes de ce cancer y survivent à peine 15 mois. À cela s’ajoutent les changements profonds qu’il entraîne chez elles pendant ce temps.

 

Afin de mettre au point une immunothérapie oncolytique pour le cancer du cerveau, le personnel du laboratoire de David Stojdl a commencé par examiner 20 virus pour déterminer lequel assurait le meilleur équilibre entre puissance et sécurité. Des années d’essais lui ont permis de cerner les deux meilleurs candidats : le virus Farmington et le virus Maraba. Dans le cadre de son projet catalyseur, M. Stojdl tentera de déterminer lequel des deux passera aux essais cliniques.

 

Les deux virus seront fabriqués de manière à exprimer un antigène associé aux tumeurs du cerveau, le pp65, qui se trouve également dans le cytomégalovirus humain (CMV). Les antigènes sont des alertes biologiques qui peuvent activer le système immunitaire et la plupart des tumeurs GBM expriment des antigènes pp65.

 

This image shows an oncolytic virus infecting and killing tumour cells. When the tumour cells become infected with virus, they glow green. When the tumour cells die, they glow red. Where you have a virus infecting (green) and killing (red) in the same tumour cell, these green and red colours merge into yellow.

L’image montre un virus oncolytique qui infecte et détruit des cellules tumorales. Les cellules infectées brillent en vert. Lorsqu’elles meurent, elles virent au rouge. Lorsqu’il y a infection (vert) et destruction (rouge) dans une même cellule, le tout vire au jaune.

Le projet consiste à fabriquer des virus Farmington et Maraba chargés de pp65 afin de déclencher de multiples missions anti-cancéreuses dans le corps. Le virus se rendra d’abord dans la rate pour activer et mobiliser le système immunitaire contre la cible cancéreuse pp65. Il se rendra aussi au cerveau pour y infecter et détruire les cellules cancéreuses, tout en servant de signal qui attirera les cellules immunitaires activées vers les cellules cancéreuses à attaquer.

 

Faire du pp65 une cible cancéreuse a ceci de génial : selon le Centre de contrôle et de prévention des maladies des États-Unis, de 50 à 80 % de la population a déjà été exposée à cet antigène par une infection naturelle au CMV et serait donc préparée à bénéficier de cette thérapie. De plus, une simple analyse sanguine permet de vérifier une exposition au CMV.

 

« Une exposition préalable au CMV signifie que notre système immunitaire a besoin de moins d’entraînement pour s’activer pleinement contre les cibles pp65 dans le traitement du cancer. Nous fabriquons donc un virus super puissant contre le cancer pour potentialiser une réaction immunitaire qui se produit déjà. Cette approche vise à trouver l’équilibre juste : un traitement à la fois sécuritaire pour le cerveau et capable d’y combattre le cancer efficacement », explique M. Stojdl.

 

Quel que soit le virus utilisé, une fois l’attaque de la tumeur terminée, le système immunitaire retient pour de bon sa capacité de repérer l’antigène pp65. Les chercheurs ont bon espoir que cela nous protégera à long terme contre toute récidive du GBM.

 

« Se débarrasser de la tumeur et l’empêcher de revenir, voilà notre objectif », affirme M. Stojdl, qui déambule tous les jours dans les corridors d’un hôpital pour enfants, endroit où, à son avis, l’espoir ne suffit pas.

 

Au fil des années, David Stojdl a connu des familles dont un enfant a succombé à cette maladie. Elles l’appuient et le motivent à poursuivre son travail. Il tire de l’inspiration et une leçon d’humilité de ces familles qui sont prêtes à passer par-dessus leur deuil pour appuyer à fond cette recherche et s’assurer ainsi que d’autres familles n’auront pas à passer par le sentiment d’impuissance terrible qu’ils ont ressenti tandis que leur enfant était emporté par la maladie.

 

C’est pour toutes ces familles qu’il tient à faire avancer ses recherches. Pour transformer cet espoir en traitement efficace.

 

Le programme de recherche de BioCanRx vise à appuyer des technologies prometteuses en les faisant passer d’un projet catalyseur à un projet dynamisant, puis à des essais cliniques, de concert avec l’industrie, des organismes de bienfaisance et d’autres organismes. Le Comité de gestion de la recherche de BioCanRx évalue les demandes à chaque étape du parcours de la recherche et examine les projets à mesure qu’ils avancent.

 

Pour en savoir plus sur la recherche de David Stojdl et son cheminement vers les essais cliniques, visitez le site Web de son laboratoire.