Par Heather Blumenthal
En date de la rédaction de ce bulletin d’information, Michel Duval travaillait, grâce à une subvention de projet catalyseur de BioCanRx, à un nouveau type d’immunothérapie pour prévenir les rechutes chez les enfants atteints de leucémie qui ont subi une greffe de cellules souches hématopoïétiques (GCSH). Son projet visait à stimuler leur système immunitaire inné pour prévenir les rechutes. Cela semble être une bonne idée, mais ce qui complique les choses, c’est que si vous stimulez les mauvaises parties du système immunitaire de ces enfants, le système pourrait finir par s’attaquer à leur corps et prendre la forme d’une maladie dite du « greffon contre l’hôte », une maladie qui peut entraîner la mort. Une partie de cette subvention de projet catalyseur a été consacrée à l’établissement de la bonne dose et de la bonne fréquence de traitement pour la nouvelle immunothérapie afin qu’elle atteigne ses objectifs sans stimuler les cellules T qui pourraient attaquer le corps du patient.
Une fois cela accompli, le Dr Duval, du Centre de recherche du CHU Sainte-Justine, est passé à la phase suivante des travaux, cette fois-ci grâce à une subvention de projet dynamisant de BioCanRx, pour prendre les mesures nécessaires afin de faire passer sa découverte du laboratoire à la clinique – et d’innover quant à la façon de développer un essai clinique au cours de ce processus.
Sa découverte porte désormais un nom : les inducteurs thérapeutiques de cellules tueuses naturelles ou ThINKK. Les ThINKK sont un type de cellules immunitaires dérivées du sang du cordon ombilical, analogues des cellules dendritiques plasmacytoïdes naturelles (ou pDC). Elles diffèrent des pDC naturelles en ce sens qu’elles ne stimulent pas les cellules T, mais seulement les cellules tueuses naturelles (NK), ce qui permet de prévenir les rechutes sans provoquer la maladie du greffon contre l’hôte qui est si dangereuse. À l’origine, cette thérapie cellulaire était destinée à être utilisée chez les enfants atteints de leucémie lymphoblastique aiguë (LLA) qui avaient subi une GSSH, pour aider à prévenir les rechutes. Cette technique s’est également révélée efficace pour les cellules de neuroblastome. Le neuroblastome est une tumeur cancéreuse solide qui se développe à partir de cellules nerveuses immatures dans différentes parties du corps. En effet, les ThINKK ouvrent un nouveau champ d’application dans l’immunothérapie post-greffe qui pourrait éventuellement dépasser ses objectifs initiaux.
La bourse de projet dynamisant vise deux objectifs :
- amener la fabrication de l’immunothérapie au niveau des normes cliniques, par l’application des principes de bon processus de fabrication;
- concevoir un protocole pour un essai clinique de phase 1 à soumettre à Santé Canada.
La première partie prévoit la poursuite des travaux que le Dr Duval effectue depuis longtemps, sachant que les ThINKK ne peuvent être utiles que s’il peut faire la transition vers la clinique. Les études toxicologiques jouent un rôle important pour garantir que l’immunothérapie est à la fois sûre et administrée à un dosage efficace pour stimuler les cellules NK sans activer les cellules T nocives.
« Nous avons examiné ce problème sous différents angles, explique le Dr Duval. Nous n’avons constaté l’activation des cellules T dans aucun de nos travaux. »
La deuxième partie, ainsi que la conception d’un formulaire de consentement, se fait avec la participation d’anciens patients de TOUS les âges, adolescents et jeunes adultes, et de leurs parents. Ce type de participation des patients est relativement nouveau dans le monde des essais cliniques, mais ses avantages sont de plus en plus reconnus.
Parmi ces avantages, il est avant tout probable que l’essai répond à des questions significatives pour les personnes souffrant de la maladie en question et leurs familles. D’un point de vue pratique, ces travaux contribuent également à augmenter les chances que les patients choisissent de participer à l’étude.
Il est essentiel de réaliser de tels travaux pour faire sortir la recherche fondamentale du laboratoire et la faire entrer dans la clinique, mais il peut être difficile de trouver un soutien pour ce type de travail.
« C’est un long voyage pour trouver les ressources nécessaires pour amener les essais à la clinique, explique le Dr Duval. Mais sans BioCanRx, ce voyage n’aurait tout simplement pas lieu. »
À terme, alors que le voyage se poursuit, la thérapie des ThINKK pourrait être une première immunothérapie « prête à l’emploi » offerte à tous les patients atteints de malignités à haut risque qui ont reçu une GCSH dans le cadre de leur traitement, et un complément novateur aux thérapies cellulaires anticancéreuses actuelles.
Heather Blumenthal écrit au sujet de la santé et de la recherche en santé depuis une vingtaine d’années et n’a jamais cessé d’être fascinée par les progrès qu’accomplissent les chercheurs canadiens.